Je n’ai pas l’habitude d’utiliser des témoignages personnels dans mon travail parlementaire, mais je vais faire une exception pour montrer que ce qu’exprime la Déclaration universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen ne s’applique pas toujours en France. Je voudrais vous parler d’un proche parent. Il s’appelle Jean.

Jean a obtenu il y’a des années de cela une thèse de doctorat en physique, option mécanique des fluides. Il a par la suite publié de nombreux articles dans des revues scientifiques de niveau international. Il intervient aujourd’hui comme expert pour auditer l’efficacité des circuits de refroidissement de nos centrales nucléaires. Pour le dire simplement, Jean a très bien réussi sa vie professionnelle.

Le problème, c’est que Jean n’est pas toujours appelé Jean. Son prénom de naissance est Saïd. Après l’obtention de sa thèse, Saïd a pendant plusieurs années cherché un poste d’ingénieur en lien avec ses compétences. Pour pouvoir vivre il a été serveur, a travaillé sur des chantiers. En désespoir de cause, Saïd a décidé de demander à modifier son état-civil pour devenir Jean, et a au passage supprimé devant son nom de famille le préfixe Ben, qui signifie « fils de » en arabe. Il a obtenu en moins de quinze jours un entretien d’embauche auprès d’une entreprise industrielle, entretien qui a débouché sur un recrutement. Ce n’est qu’après de longues années de vie professionnelle qu’il a repris son prénom de naissance.

Le cas de Saïd n’est pas un cas isolé. Nombreux sont nos concitoyens qui à force de se voir refuser l’accès à un emploi, à un logement, décident de changer de nom, de mentir sur leur âge, ou sur leur adresse. Nombreux sont celles et ceux qui sont contraints de se dépouiller d’une partie de leur identité pour pouvoir vivre dignement, car ils subissent des discriminations. Nombreux aussi sont ceux qui se résignent, et poursuivent leur chemin sans que leur soit apportée de réponse à la hauteur de ce qu’ils subissent.

Cette violence symbolique que vivent nombre de Françaises et de Français, elle n’est pas acceptable en République.

C’est l’objet de cette proposition de loi.

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